Édito

Édito

Le NON français et le NEE hollandais
contre la Constitution Européenne
ont gagné. C’est une victoire
large et sans appel dont nous nous
réjouissons. Tout comme du très bon
score (60 %) du NON chez les 18-25 ans,
preuve que l’on peut être en faveur de la
construction européenne - comme l’est
notre génération - mais contre une
Constitution libérale et anti-démocratique.

Ce fut un débat politique riche et étendu
et nous sommes heureux d’avoir participé,
notamment au sein des différents
collectifs constitués - locaux et nationaux - à cette grande campagne, qui a vu le
retour par la grande porte des questions
politiques, au sens noble du terme, dans
la vie des citoyens.

Aidés par des personnes d’autres Attac
d’Europe, qui n’ont eu de cesse d’élargir
le débat, nous avons mené campagne,
texte à la main, (co-)organisant
des dizaines de réunions publiques. Loin
de nous présenter comme des experts de
la chose politique, nous avons mis en
pratique le leitmotiv d’Attac, l’éducation
populaire, en nous informant, en cultivant
la critique et en tentant de faire partager
nos analyses, progressivement
construites, avec les autres étudiants,
plus intéressés que l’on ne voulait le laisser
croire.

Le premier enseignement de cette
échéance référendaire restera le positionnement
pro-européen d’une grande majorité
des partisans du NON et la mise à
jour d’un nouveau clivage entre pro et
anti-libéraux, entre ceux résignés vis-à-vis du système actuel, et ceux qui croient
qu’une autre Europe est possible, une Europe des peuples et pour les peuples. Les
Français, dans leur ensemble, ont refusé de cautionner la perversion néo-libérale
de la construction européenne et épousé l’espoir d’une Europe de paix, de solidarité
et de coopération entre les peuples. A l’heure où de grands défis tant civilisationnels
qu’environnementaux nous attendent, l’avenir de plus de 450 millions de
femmes et d’hommes ne doit pas être entravé par une Constitution qui "graverait
dans le marbre" les dogmes néo-libéraux.

Si les arguments nationalistes et souverainistes n’ont pas été absents de la
campagne - arguments que le camp du OUI ne nous a pas épargnés non plus - le
camp du NON a bien gagné par la gauche, tout en devenant majoritaire à gauche,
sur des bases sociales, solidaires et internationalistes. Un feu de paille ? Le succès
de la rencontre nationale des collectifs pour le NON de gauche du 25 juin laisse
penser le contraire (cf dossier Europe). Ainsi se précise l’espoir de voir l’essai du 29
mai transformé en élaboration d’alternatives et de luttes contre le libéralisme, pour
une autre Europe. Une autre Europe pour un autre monde, un monde qui ne soit
pas inféodé aux seuls intérêts des 8 chefs d’État des
pays les plus puissants réunis au sein du G8 [cf article,
p15]. Car l’Europe que nous avons défendue en votant
NON est une Europe solidaire, sociale et démocratique,
une Europe ouverte sur le reste du monde, qui se donne les
moyens de lutter contre la pauvreté et la faim sur toute la planète.

L’autre Europe que nous avons appelée de nos voeux le
29 mai s’inscrit dans notre combat pour un autre monde.
Un autre monde, solidaire et sans guerre, est un monde dans lequel les accords de l’OMC
(Organisation Mondiale du Commerce) ne
sacrifient pas tous les biens communs et
toutes les dimensions humaines et sociales sur
l’autel du libéralisme et des intérêts financiers [cf
article, p7]. Le prochain sommet de l’OMC qui
aura lieu à Hong-Kong du 13 au 18 décembre
doit clore le round de négociations, entamé
loin du contrôle citoyen lors de la
réunion de Doha en 2001, pour avancer
dans la libéralisation et la marchandisation
de la planète. Nous devons rester
mobilisés contre ces rencontres qui, comme
Dracula, ne supportent pas la lumière apportée par
le regard critique des citoyens.