Que se passe-t-il si le NON l’emporte lors du référendum sur la « Constitution » Européenne ?

Peut-être à cours d’arguments sérieux, les défenseurs de la « Constitution » européenne, de droite comme de gauche, prétendent, en agitant leurs bras affolés, que l’Europe ne se remettrait pas d’un NON au référendum. Pourtant le référendum portera seulement sur la « Constitution » européenne, pas sur la construction Européenne. On peut être contre le traité et pour la construction européenne, une autre construction européenne, plus sociale et démocratique. Attiser cette idée qu’un NON serait le début d’un chaos en Europe montre que les partisans du oui :
refusent le jeu démocratique du référendum, préférant qu’il soit une simple caisse d’enregistrement des décisions qu’ils ont prises ;
n’ont pas compris comment fonctionne l’Union Européenne.

Que se passe-t-il vraiment si la France ou un autre pays refuse de ratifier la « Constitution » ? Pas grand chose. Le traité de Nice, en vigueur depuis le 1er Mai 2004 (seulement...), ainsi que les traités précédents, continuent à régir l’UE jusqu’en 2009. Le traité de Nice serait selon certains une calamité, alors que ce sont généralement les mêmes qui l’ont signé (Jacques Chirac et Lionel Jospin) et qui le considéraient, à l’époque, comme un grand succès. Alors que nous, nous étions déjà dans la rue à Nice, en décembre 2000, pour dénoncer l’Europe libérale que l’on nous construit d’une manière totalement non démocratique. Le traité de Nice et les traités qui le précèdent ne sont pas des traités qui nous font avancer vers une Europe sociale, écologique, démocratique, de paix et de solidarité. Certainement pas. Mais comment comprendre que ceux qui ont ratifié le traité de Nice avec enthousiasme il y a 4 ans puissent aujourd’hui défendre l’inverse ? N’avaient-ils pas lu le traité qu’ils avaient signé à l’époque ? Ou bien est-ce la « Constitution » qu’ils n’ont pas lu ?

Sur le plan juridique, un NON à la « Constitution » ne change pas grand chose, l’UE suivant son cours libéral. Politiquement, par contre, il ouvre la possibilité de négocier un nouveau texte. Pour la simple et bonne raison que tous les pays, ou presque, ont intérêt à ce que la première partie du texte entre en vigueur. Cette première partie simplifie les procédures institutionnelles de l’UE en les rendant plus fonctionnelles. Il est vraisemblable qu’ils éliminent la troisième partie qui constitutionnalise des politiques libérales et proposent un nouveau texte comprenant la seule première partie.

A moins de jeter tout débat contradictoire aux oubliettes et de bafouer les principes démocratiques du référendum, il faudra bien que les tenants du OUI revoient leur argumentaire sur un prétendu chaos provoqué par un vote NON. Par contre il faut se demander si le véritable scénario catastrophe n’est pas plutôt un vote OUI, un vote qui constitutionnaliserait des politiques libérales que le MEDEF, Nicolas Sarkozy, Tony Blair et Silvio Berlusconi appellent de leurs voeux. Un vote OUI reviendrait à rendre un certain nombre de politiques libérales (primat de la concurrence, privatisation des entreprises et services publics, dumping fiscal et social, ...) irréversibles :

  • en leur donnant un statut constitutionnel ;
  • en bloquant toute possibilité de révision de la « Constitution » grâce à la règle de l’unanimité.

Comment imaginer que des gouvernements élus puissent alors mener des politiques économiques et sociales qui aillent à l’encontre de ces dogmes libéraux qui seront ainsi érigés en horizon indépassable de l’Union Européenne ?

Voter NON, c’est refuser d’asservir notre avenir dans des politiques libérales, sans faire entrer l’UE dans une crise institutionnelle, mais bien au contraire, en se donnant les moyens d’ouvrir un débat démocratique sur l’Europe sociale que les Européens désirent.